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Autrui

En terminale, j’avais un prof de philo vraiment super. Je garde un très bon souvenir de lui. Je me souviens que nous avions étudié le thème d’"autrui" et il avait cité à de très nombreuses reprises le philosophe Levinas. Depuis toutes ces années (on peut dire que ça commence vraiment à dater, c’était en 1996 !), j’ai conservé dans un coin de ma mémoire une phrase de Levinas dite et redite par mon prof :

"Je suis responsable d’autrui sans attendre la réciproque."

C’est étonnant que cette phrase en particulier m’ait autant marquée. Je ne suis pas certaine de l’avoir bien comprise à l’époque...du moins j’en avais une compréhension très superficielle. Il m’a fallu 13 ans pour évaluer tout le sens de ces quelques mots, grâce (ou à cause ?) d’un événement qui s’est produit cette semaine. J’ai trouvé à ce sujet un cours très intéressant sur Internet. Philippe Fontaine, maître de conférences à l’université de Rouen, écrit :

"Je suis responsable d'autrui sans en attendre la réciproque. Le mouvement à sens unique de Moi à l'Autre ne doit précisément pas s'invertir en réciprocité, car ce retour à l'origine serait retour au Même, c'est-à-dire résorption de l'altérité dans l'identité tautologique du Moi comme subjectivité autonome et conquérante."

Ces phrases m'ont permis une véritable prise de conscience...Il m’aura fallu longtemps, mais mieux vaut tard que jamais ! Je me coucherai plus "sage" ce soir, même s’il me reste un long chemin à parcourir sur la voie de la sagesse !

Ecrit par C-C, le Jeudi 28 Mai 2009, 13:43 dans la rubrique Jour après jour.

Commentaires :

osway
osway
28-05-09 à 20:22

euh...

moi j'ai rien compris du tout...............

 
C-C
C-C
29-05-09 à 02:01

Re: euh...

Bonsoir Osway,

Ok, j’admets, la phrase est particulièrement alambiquée...Ce que j’en comprends (mais je peux me tromper), c’est qu’il y a deux points bien distincts :

- notre responsabilité et nos obligations envers autrui.

- la nécessité de ne pas attendre de réciprocité de la relation à autrui. Quand Philippe Fontaine parle de "résorption de l'altérité", je pense que cela signifie que l’on ne doit pas attendre de l’autre d’agir comme on le voudrait. Cela reviendrait en effet à chercher en l’autre un double de soi (alors que l’autre n’est pas un "alter ego"), et donc de retirer à l’autre sa caractéristique principale, qui est d’être différent de soi (l’autre est juste "alter").

Après une petite recherche, j’ai trouvé que la phrase complète de Levinas est la suivante :

"Je suis responsable d’autrui sans attendre la réciproque, dût-il m’en coûter la vie. La réciproque c’est son affaire."

Cela signifie trois choses :

- que je suis responsable d’autrui,

- que je ne dois pas en attendre la réciproque,

- que la réciproque dépend uniquement d’autrui et non de moi, puisqu’autrui est responsable de moi (tout comme je suis responsable de lui). En gros, cela n'engage que lui et ne me regarde pas...

J’ai trouvé sur cette page un paragraphe qui éclaire un peu mieux les notions de responsabilité et de réciprocité introduites par Levinas :

"Autrui à qui je m'adresse, ne serait-il pas d'abord celui envers qui j'ai la relation que l'on a à l'égard de celui qui est plus faible. Par exemple : je suis généreux envers autrui sans que cette générosité soit aussitôt réclamée comme réciproque. Bien que Buber soit l'un des premiers penseurs à mettre l'accent sur une relation du Je-tu par rapport au Je-cela, ce concept de réciprocité me troublait parce que dès lors que l'on est généreux en espérant la réciprocité, cette relation ne relève plus de la générosité mais de la relation commerciale, l'échange de bons procédés. Dans la relation à autrui, l'autre m'apparaît comme celui à qui je dois quelque chose, à l'égard de qui j'ai une responsabilité. De là, l'asymétrie de la relation du Je-tu, et l'inégalité radicale entre le Je et le tu, car toute relation avec autrui est une relation avec un être envers lequel j'ai des obligations."

Je trouve que l’exemple donné par Levinas, concernant la générosité, est particulièrement parlant : la vraie générosité n’attend rien en retour. Si quelqu’un est généreux en attendant d’être "récompensé" par autrui, il ne s’agit plus de générosité car ce n’est plus un acte désintéressé. En résumé, j’ai des obligations envers autrui et je dois accepter que cela n’oblige pas autrui à m’accorder la réciproque : la relation avec autrui est donc forcément asymétrique.

Je ne sais pas si j’ai été un peu plus claire et si ma compréhension est bonne, mais j’espère que cela aura au moins permis d’ouvrir des pistes de réflexion :-)

Bonne nuit à toi !

CyCy