Un an déjà...Quelques minutes de bonheur sur une grosse moto, des mois de douleurs...Que le temps passe vite ! J’ai l’impression que cet accident a mis ma vie entre parenthèses. Mon corps qui essaie de se réparer accapare toutes mes ressources, toutes mes pensées pendant les six premiers mois. Les mois suivants, j’ai commencé à accepter la douleur encore présente et à oublier les souffrances passées. Remonter sur une moto ? Oui, bien sûr, j’y pense encore et je sais que cela arrivera bientôt, dans les semaines à venir sans doute. La moto, c’est dangereux ? Oui, j’en suis consciente, mais j’ai envie de vivre mes désirs à fond sans me mettre de barrières !
Guérir. Je suis fascinée par mes étonnants super pouvoirs. Appelez-moi Super Jaimie ou Wonder Woman, merci. Ce petit corps fin, frêle et fragile se répare, se reconstruit tout doucement. Mon bras est presque totalement redevenu fonctionnel, malgré le fait qu’une partie de mon cubitus ait été broyée par l’accident. La cicatrice sur ma mâchoire est de moins en moins visible : avant, j’étais obligée de mettre une grosse couche de maquillage pour la camoufler, à présent, on la distingue à peine même si je ne suis pas maquillée. Mes jambes sont peut-être la partie de mon corps où les traces de mon accident sont les plus visibles : tout le long des tibias, la peau est rougie et bleutée et j’ai encore des hématomes sous la peau. Ca finira par passer avec le temps...il faut juste être patiente.
Pour mon petit orteil cassé fin mai, mes super pouvoirs agissent également. J’ai fait une radio de contrôle et j’ai eu rendez-vous avec mon chirurgien adoré hier. Miracle de la nature : les deux morceaux d’os ne font plus qu’un. Mon chirurgien m’a donc enlevé le strap. Je lui ai demandé si je peux à nouveau porter mes hauts talons, courir et faire du roller. Il m’a dit qu’il n’y a aucun souci pour mettre mes talons et que je peux courir (il me conseille néanmoins d’y aller doucement car je risque d’avoir mal). Pour le roller, il est plus dubitatif et m’a répondu que l’on peut se casser beaucoup plus de choses en roller qu’en courant, et que les rares cas de fractures du col du fémur chez les jeunes surviennent lors de chutes en roller. Il a plaisanté un peu en me disant qu’il était de garde le lendemain, au cas où. Quel comique ! :-)
Guérir. Mon corps guérit apparemment de tout, lentement. Est-ce que les blessures de l’âme peuvent guérir comme les blessures du corps ? Je n’en sais rien. Je me souviens qu’en prépa (je prends un coup de vieux en parlant de cette lointaine époque), j’avais vécu une déception sentimentale que j’avais racontée ici et qui m’avait un peu affectée à l’époque : l’homme qui me plaisait et qui occupait mes pensées était sorti avec une autre que moi (c’était d’ailleurs assez prévisible car nous vivions à 900 kilomètres l’un de l’autre et selon moi, il est illusoire de croire qu’on peut démarrer et vivre une relation à distance). Mon ami Laurent me consolait et me disait : "On se remet de tout". A chaque fois qu’il m’arrive une galère dans ma vie, je repense à ce brave Laurent. "On se remet de tout". Quelle drôle d’idée, non ? Moi je crois qu’on ne remet jamais de rien. Les blessures de l’âme laissent toujours des cicatrices plus ou moins profondes. Je discutais de cela avec Koma, un de mes voisins que je connais depuis un mois maintenant. Il pense que parfois, il vaudrait mieux oublier ces choses qui font trop mal. Moi, je crois qu’il ne faut pas oublier, qu’on ne peut pas oublier mais qu’il faut plutôt apprendre à apprivoiser ce passé parfois douloureux. Ne pas oublier, mais arrêter de souffrir. Garder de la "tendresse" pour les beaux moments, ne pas pleurer en pensant aux déceptions qui ont pu suivre...C’est vrai que c’est difficile, mais après tout, ce passé, c’est ce qui nous rend tels que nous sommes aujourd’hui. Je ne serai pas celle que je suis aujourd’hui si ma route n’avait pas croisé celle de telle ou telle personne. Ces rencontres, ces amitiés, ces amours nous façonnent comme un sculpteur qui parviendrait à réaliser un chef d’œuvre à partir d’un bloc de marbre. A quoi bon essayer de faire comme si tout cela n’avait jamais existé ? Se faire confiance, avoir confiance en l’avenir, être toujours fidèle à soi-même, ne pas vivre à moitié pour ne pas avoir de regrets, donner à certaines rencontres la chance et le pouvoir de peut-être changer nos vies. Ramasser cette pièce d’un centime par terre et découvrir qu’elle est magique et vaut en fait tous les trésors du monde. Et si le bonheur nous attendait encore, quelque part ? Et si le beau pouvait vraiment sortir de nulle part ? Depuis 2008, j’ai envie d’y croire.